Ici, tu vas effectuer ton test RP tout en précisant ton histoire et ton caractère. Ce test est libre : fais agir ton personnage dans le contexte de ton choix.
A une certaine époque, Bohémont était un domaine où il faisait bon vivre. Niché au cœur du duché d’Ansemer, il bénéficiait des avantages de la mer, sans les inconvénients. Les vagues ne frappaient pas à leurs murs et le vent marin n’importunait personne, mais le léger parfum de l’iode restait perceptible pour les nez fins. Les terres étaient des plus fertiles et le soleil ne les abandonnait que rarement.
Tout un chacun appréciait du fond du cœur son séjour en ces lieux. La communauté était harmonieuse et, clairement, il faisait bon vivre à Bohémont. Par-dessus tout, la famille qui y régnait était juste et loyale. Ils avaient prêté allégeance à Augustus, comme leur duc avant eux, mais ne l’avaient pas suivi dans sa folie. Depuis toujours ils avaient respectés les coutumes et les lois, sans jamais y déroger.
Vraiment, c’est une époque plaisante à la mémoire. Bohémont était un glorieux domaine, la silhouette du manoir familial amenait réconfort et sentiment de sécurité. Les Bohémont, dans leur chance innée, eurent trois fils. Avec trois héritiers mâles, tous dormaient sur leurs deux oreilles, les Bohémont ne s’éteindraient pas de si tôt. Alcédius, l’ainé, avait hérité d’une certaine confiance en lui contagieuse. Le peuple voyait en lui le parfait dirigeant du domaine, et les yeux de son père brillaient d’une grande fierté. Il passa tout son temps à le former, Alcédius devint son ombre qui jamais ne le quittait. Tout un chacun voyait en lui le parfait héritier, et jamais il ne douta de ses capacités. Aldémir, le second, savait manier l’épée avant de savoir lire, aussi l’armée du Duché eut-elle grandement raison en le prenant en son sein. Rapidement, il monta les échelons, et personne ne douta que c’était pour son talent plus que pour son nom. Alaric, le troisième, rejoint la Guilde des Guerriers dès qu’il fut en âge. Il était également chargé de protéger son ainé, et devint l’ombre de l’ombre.
Ces trois jeunes hommes étaient forts, loyaux et droits. Et pourtant, le dernier enfant de la famille allait être fragile, associable et froide.
Grandir entourée d’hommes, ce n’était pas des plus agréable. La petite Aliénor était née bien trop tard, dix années la séparait d’Alaric, c’était bien trop. Si même le plus jeune des Bohémont ne consentait à perdre son temps pour jouer avec la fillette, imaginez bien que les deux plus grands s’en souciaient encore moins. Aliénor, pourtant, aurait adoré pouvoir jouer avec eux. Elle rêvait qu’ils lui apprennent à monter à cheval, et qu’ils lui montrent comment se battre avec une épée. Mais sa mère veillait. Elle était sa perle rare, la prunelle de ses yeux, son unique fille. Elle deviendrait douce et délicate, il y avait bien assez de bagarres dans l’avenir de ses autres enfants.
Aliénor fut donc éduquée comme il se doit. Il lui fallait être cultivée pour savoir garder l’intérêt de ses interlocuteurs, s’intéresser à la politique pour pouvoir suivre une discussion sans bailler, et garder une part de mystère pour donner envie aux hommes de passer plus de temps en sa compagnie. Oui, Aliénor voyait son avenir tout tracé : elle épouserait le meilleur parti possible, apportant avec lui de nouvelles alliances au domaine familial.
C’était sans compter sur la peste. On ne l’avait pas revue depuis des années à Ansemer, mais le climat devait lui plaire, à cette traitresse. Alaric était en mission dieu-seul-sait-où, tandis que la jeune femme rendait visite à une amie à Port-Liberté. Eux seuls en réchappèrent. L’épidémie toucha le domaine (et quelques domaines voisins et amicaux), tuant en quelques jours seulement quelques dizaines d’ansémariens. Parmi eux, les quatre Bohémont restés au manoir.
Le choc fut immense pour Aliénor, à la lecture de la funeste lettre. Pourtant, elle se garda bien de le montrer. Son amie était noble, plus noble qu’elle, et sa fierté lui conseilla de ne pas se laisser aller devant elle. Ne jamais se montrer ridicule. Ne jamais se trahir. Dès lors, elle s’enferma dans un cercle infernal. Devant sa tendre amie elle n’afficha aucune faiblesse, devant les inconnus elle ne laisserait rien paraître.
Alaric se voyait donc propulsé à la première place, lui qui s’était toujours fort bien accommodé de la troisième. Sans n’avoir jamais reçu aucun conseil parental sur la gérance du domaine, il se retrouvait au cœur de l’action. Ses bras étaient forts, mais la plus épaisse des carrures s’avère être parfois bien inutile face à pareille adversité. Dans un grand moment d’égoïsme qu’Aliénor lui reproche encore intérieurement, il abandonna ses droits. Il confiait Bohémont à sa jeune sœur, bien trop jeune et trop fragile pour tout cela. Il s’en alla avec son épée, vers des missions plus plaisantes à son cœur.
Quel choix avait-elle ? Abandonner Bohémont à des étrangers ? Certainement pas. Elle décida de se servir de son orgueil pour arborer une tête haute et faire du mieux qu’elle le pouvait. Pendant une année, elle géra le domaine. Les dettes tombaient, les créanciers s’énervaient, on murmurait qu'une femme n'était pas faite pour régner, et encore, la plupart du temps c'est le mot « fille » qui était utilisé. Après avoir accumulé les dettes et agaçé les habitants du fief, Aliénor abandonna à son tour la partie. Elle demanda une audience avec l'empereur et lui demanda de l'aide. Elle mendia pour qu'il lui vienne en aide, plus précisemment. Elle déteste cela, plus que tout. Augustus concéda à la placer sous la tutelle de la couronne, et elle choisit un intendant pour gérer Bohémont. Elle espérait qu'il pourrait réparer les pots cassés, mais s'il pouvait au moins cesser ses dégâts, ce serait déjà une bonne chose. Il la tient régulièrement au courant de tout ce qu'il se passe dans ses terres, et semble réellement se préoccuper de son sort. C'était un des bras droits de son père, elle ne voyait personne d'autre que lui pour assumer cette fonction. Et surtout pas elle.
Et dire que les prétendants se jettaient aux portes de Bohémont, il y a encore quelques mois. Ils le faisaient depuis ses quatorze ans, pourquoi tout cela s'est-il rarifié ? Elle devait épouser Melbren de Severac, mais son ascension soudaine et la ruine des Séverac annula les noces. Elle ne s'y opposa pas, lui non plus. A ce jour il reste son ami, son confident, mais elle n'avait jamais réussi à rêver de passion avec lui. L'ironie a voulu qu'elle soit ruinée elle aussi, mais qu'importe, son nouveau titre ne la quittera pas : elle est et demeurera Dame de Bohémont.
Quelques autres avant lui tentèrent leur chance, mais elle espérait toujours trouver mieux. Jusqu'à maintenant, où c'est elle qui espère, elle qui attend, et elle qui cherche. Elle a besoin d'un époux, d'un homme qui saura l'aider à redresser le domaine qu'elle a laissé à contrecoeur. Un homme avec une petite fortune, pas forcément le plus riche... Mais à la cour, elle n'est plus la seule jolie et délicate fleur à qui passer la bague au doigt. Bien d'autres pépites se pavanent dans les mêmes couleurs, elle ne sera plus jamais la seule fille. Elle a même perdu de son charme, devenant plus froide, plus sombre, et renforçant de jour en jour sa carapace d'insensible.