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 Il en est comme de ces beaux songes qui ne vous laissent au réveil que le déplaisir de les avoir crus. - Molière [PM Mélusine & Mélisande]

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18 octobre 802

La nuit fait voir de belles choses à qui sait voir les paupières closes. Le rêve élève l’élève qui sait écouter la leçon de ses songes. (Nicolas Certenais)
  • Nom des participants : Mélisande & Mélusine de Séverac
  • Statut du sujet : Privé
  • Date : 18 octobre 802
  • Moment de la journée & météo : Une heure du matin, pluvieux
  • Saison 2, chapitre 1



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La présence de Melsant apaisait Mélisande, qui lui était infiniment reconnaissante de sa patience, de ses soins, de son amour inconditionnel. Et pourtant, elle s'en voulait énormément d'être retenue par le secret qu'elle cherchait délibérément à lui cacher. Elle ne pouvait surmonter sa culpabilité, à l'idée qu'il ait à savoir une telle chose. Quoi qu'il en dise, elle avait déshonoré sa famille.

Elle ne pouvait le lui avouer, même si garder ce secret l'envenimait, nuisait à la jeune femme qu'elle était. Même sans savoir ce qui la troublait, Melsant l'aidait à aller mieux, petit à petit. Ses pensées étaient moins embrumées, ses peurs moins vivaces. Elle tentait même d'appréhender ces voix qu'elle entendait. Il lui semblait que certaines appelaient à l'aide, que d'autres conversaient. Mais avec quoi, avec qui ? Et surtout : pouvait-elle y faire quelque chose ? Elle n'en avait pas la moindre idée, et ça n'était pas là sa pensée première. Mélusine occupait totalement son esprit, ses songes, toutes ses pensées. Comment aurait-il pu en être autrement ?

Bien que Melsant n'en parle pas, persistant chaque jour à aller la chercher, elle savait bien que comme elle, il craignait la mort de sa soeur. Mélisande n'y aurait pas survécu. Elle chérissait sa famille plus que tout, et davantage encore sa jumelle. Elle était sa moitié, personne ne serait jamais aussi proche d'elle que Mélusine ne l'avait été, et si elle était morte alors qu'elle était si chère à ses yeux, Mélisande n'aurait tout simplement plus eu la force de se battre. Elle n'en aurait plus eu l'envie. Elle savait que cela briserait le coeur de son frère, de ses parents et de son autre frère quand ils l'apprendraient, mais si vivre sans Ingmar lui était difficile, vivre sans Mélusine lui semblait insoutenable, impossible.

Elle dormait, maintenant, rêvant de retrouver Mélusine, et de l'étreindre. Elle n'avait pas le moindre souvenir de la semaine qui venait de passer, se rappelant à peine la gargouille que Melsant lui avait dit lui être tombée dessus dans le jardin de Castiel, mais le visage de sa si chère Mélusine était gravé dans ses yeux, comme si elle l'avait contemplé chaque jour de son coma. Une fois de plus, elle se trouva transportée sur une grande plaine herbeuse, sous le soleil, se voyant en présence de Mélusine, riant, profitant de la vie. Mais cela ne dura pas longtemps, avant qu'elle ne se réveille, retournant à la dure réalité, les yeux baignés de larmes. La vérité était qu'elle n'avait pas réellement rit depuis bien longtemps, et qu'il lui semblait que ce geste anodin lui était désormais interdit. Qu'il était banni pour elle, que plus jamais elle ne gouterait à ce plaisir.

Elle mit longtemps, à travers ses yeux embrumés par les larmes, pour voir Mélusine qui flottait devant elle. Dormait-elle encore ? Avait-elle seulement rêvé de se réveiller, une chute encore plus dure l'attendait-elle, à son réveil ? Surement, sinon comment aurait-elle pu voir sa soeur qui semblait si présente, si vivante, juste en face d'elle ? Peu lui importait. Elle savait qu'elle souffrirait, mais elle ne pouvait renoncer à ces minutes avec sa soeur, sa chère soeur, même s'il ne s'agissait que de chimères. Elle se leva, doucement, se sachant encore faible de sa collision avec la gargouille, et s'approcha doucement de sa moitié, de son double. Elle leva la main, effleurant sa joue, surprise par la douceur et la fermeté de celle-ci sous sa main, alors qu'elle savait qu'il ne s'agissait que d'une illusion. Mais l'esprit ne jouait-il pas de drôles de tour, parfois ?

« Mélusine ? »


Dernière édition par Mélisande de Séverac le Ven 22 Mar - 14:22, édité 2 fois
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Mélusine de Séverac
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Il fait nuit. Une nuit profonde, une nuit noire – une nuit souveraine, solennelle et puissante, immuable et éternelle. J'aime la nuit. C'est un peu étrange, j'en ai conscience – une part de moi se rappelle qu'elle était jadis la petite fée solaire de Séverac et de Sinsarelle, un feu follet incandescent à la flamboyante énergie qui irradiait sa vitalité. J'en suis tellement loin aujourd'hui – tellement loin, tellement changée, tellement meurtrie. Suis-je encore Mélusine ? J'en doute parfois. Ma vie me semble loin. Éthérée, effacée, éradiquée, presque oubliée tant ma mémoire s'en est écartée. Quelques bribes me reviennent, parfois. Un matin clair à Séverac, un amant surpris par le lever du jour cavalant à travers les jardins, ses pantalons à la main – et la voix de mon père, dans le couloir, s'adressant posément à Enguerrand, son majordome, réclamant son arbalète pour chasser le gibier aperçu dans les allées – avant de déplorer que ce vil maraud ne piétine ses rosiers. C'est ainsi qu'il devient su et connu en Sombreciel que le seigneur de Séverac avait de bien accortes jumelles, mais également l’œil sûr et de bien adroits mâtins. Il avait l'habitude d'ôter de la main des blessés les pantalons qu'ils n'avaient pas eu le temps de renfiler, et les conservait comme trophées – c'est ainsi que je pris l'habitude de remettre à mes amants un de mes jupons en souvenir de notre nuit, et que ceux qui parvenaient à s'esquiver conservaient ainsi ce gage inestimable de leur prestesse et de leur pied léger. Et ceux qui revenaient... L'escalade de nos murailles était devenu, avant notre départ pour la capitale, un charmant sport ducal. Après tout, il fallait bien des hommes de qualité pour obtenir le droit de culbuter une des filles de Maximilien de Séverac – et j'ai souvent surpris ma mère lui tendre les carreaux de l'arbalète. Par tous mes jupons armoriés, et la masse de ceux qui ont réussi à s'en emparer...

Une autre vie, oui. Avant que Dragonvale ne tombe du ciel avec Melbren dans ses murs, fauchant sa vie avec une implacable fatalité – comment aurait-il pu en réchapper, mon petit frère si charmant, si discret ? Melsant était dans les murs du Palais, lui aussi, je le sais, je l'y ai vu – mon frère le guerrier, lui si fort, lui que rien ne saurait abattre, comment aurait-il pu résister au fracas des murs s'effondrant sur lui ? Mélisande, ma sœur, ma jumelle, l'autre moitié de mon âme, si douce, si belle, elle qui savait tout de moi, avec laquelle j'ai tant partagé, comment aurait-elle pu résister aux étages du Palais l'ensevelissant sous les décombres dans les geôles où elle avait été jetée ?

Ne suis-je pas, après tout, moi-même décédée, broyée sous les dalles de ce plafond qui m'a écrasée, brisant mes membres et rompant mon corps, oblitérant toute connaissance dans un univers de souffrance avant que les ténèbres ne viennent m'emporter ? La preuve, n'est-ce pas ce corps éthéré que je devine sous la lune spectrale qui m'éclaire de ses rayons, dans la brume évanescente qui s'enroule en sinueux volutes autour de moi, autour d'elle ? La preuve, n'est-ce pas que je revois Mélisande à présent, d'esprit à esprit alors que la tourmente nous a ravi nos vies, fauchant nos jours dans le même éclat d'un destin fatal et importun ?

Sa main effleure ma joue, de peau à peau, dans une caresse irréelle qui traduit bien ô combien nous sommes différentes à présent de ce que nous étions jadis. Il ne reste rien de cette chaleur qui couvait de la sœur à la sœur, de ces rires d'enfants qui s'étendaient autour de nous en vives cascades colorées de bonheur, de ces étreintes complices qui nous réunissaient dans la plénitude d'une affection mutuelle lorsque la solitude nous gagnait. Plus rien – fini, envolé, plus de sens à affoler, plus de lèvres à unir, plus de mains à enlacer, plus de rires à partager, plus de secrets à nous raconter. Plus rien que la mort, laide, affreuse, qui défigure nos âmes naguère jumelles – je n'en peux plus, et dans la beauté cristalline des étoiles silencieuses, je hurle à en perdre haleine, rejetant loin de moi le bras de ma sœur trépassée, rejetant toute son attention, toute son amitié. Je hurle à m'en déchirer les poumons – je hurle, désespérée, pour le massacre de ma famille saccagée.

« Va-t-en ! Tu n'es rien, laisse-moi ! Pourquoi me tourmenter ? Que veux-tu, n'ai-je donc pas assez sacrifié ? Laisse-moi reposer en paix ! »
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MessageSujet: Re: Il en est comme de ces beaux songes qui ne vous laissent au réveil que le déplaisir de les avoir crus. - Molière [PM Mélusine & Mélisande]   Il en est comme de ces beaux songes qui ne vous laissent au réveil que le déplaisir de les avoir crus. - Molière [PM Mélusine & Mélisande] I_icon_minitimeDim 17 Mar - 11:50

Elle se perd dans ce songe, Mélisande, elle ne sait plus où elle est. Que fait-elle ? Elle plonge à corps perdu dans cette chimère qui lui rappelle des jours infiniment plus doux, une quiétude qu'elle n'a pas connu depuis bien longtemps. Retrouveront-ils tous un jour ce bonheur qui a éclaté avec l'action détestable de ce tyran, avec le vol de Waldemar, davantage qu'un objet, un symbole de toute leur splendeur, de leur rayonnement ? Auront-ils le droit d'être réunis, tous les six, de reconstruire ce qui fut détruit dans des temps qui sont si lointains maintenant qu'ils s'effacent et perdent leurs couleurs, qu'ils sont égarés dans des limbes nébuleuses ? Elle revoit son père chasser leurs amants, elle revoit Melsant essayer de se dissimuler derrière un arbre alors que sa corpulence rendait la tâche ardue, pendant que Mélusine lui laissait le temps de se cacher, alors qu'elle les peignait tout en discutant avec Melbren.

Elle ne le sait pas, elle qui a toujours été la jumelle fragile, la jumelle délicate, qui était infiniment plus posée que tous ses autres frères et sœur, plus prompte à rêver à l’impossible, que rien ne sera plus jamais pareil. Elle l'espère, ce retour à la normale, à ces jours dorés, bien qu'elle se dénie le droit de goûter à cette quiétude qu'elle espère que sa famille retrouvera, qu'elle se dénie le droit d'être une Séverac après l'affront qu'elle considère avoir commis, le déshonneur qu'elle apporte à leur nom. Mais ce qu'elle vit en l'instant n'est qu'un songe, n'est-ce pas ? Elle peut s'autoriser encore un instant d'être Mélisande de Séverac et de savourer cet instant en compagnie de l'incarnation de sa sœur, de cette illusion qui se dévoile à elle, qui l'attire, qui lui semble tellement plus apaisante que ses nombreux cauchemars... En compagnie de sa jumelle, elle se sent revivre, elle est Elle à nouveau.

Las ! cela ne doit pas durer. Est-ce trop que de demander un peu de joie, de profiter d'une certaine insouciance ? Ses yeux s'embuent, les larmes les inondent alors qu'elle se fait rejeter, repousser, trop violemment pour son cœur meurtri, son corps blessé et faible. Ô, le Destin ne lui laisserait-il donc jamais de répit ? Quel crime pouvait-elle bien avoir commis, pour que l’oubli ne lui soit pas offert, que pas une seconde, elle ne s’abandonne et profite ? N’est-ce donc qu’un cauchemar de plus, où elle doit souffrir de perdre sa jumelle, le complément de son âme, celle pour qui elle veut restaurer la splendeur de Séverac afin qu’elle retrouve son innocence d’enfant ? Devra-t-elle, après cela, souffrir de perdre Melsant ? Finira-t-il par lui tourner le dos, comme Mélusine qui ne veut plus d’elle en cet instant ?

Peut-être serait-ce préférable qu’elle ait succombé à la chute de Dragonvale ? Pourquoi donc sa cage ne s’est pas effondrée sur elle, par quel miracle a-t-elle pu en réchapper vivante ? Et surtout, quel sort cruel l’attend, en compensation ? Augustus contrôlerait-il donc toutes les puissances qui se meuvent en Arven, et aurait-il demandé que le malheur uniquement régisse la vie de Mélisande de Séverac ? Elle ne sait plus rien, la seule certitude en elle est qu’elle doit abréger sa vie, abréger sa peine, peut-être s’aider des poisons qu’elle voulait acheter pour un tout autre usage. Ô, si même sa sœur ne veut plus d’elle, que lui reste t’il ?

Alors elle pleure, elle expie son malheur, sa douleur, sa fureur. Mille lames dépècent son cœur, que les larmes ne parviennent à raccommoder. Elle n’a plus rien, juste cette enveloppe physique qu’elle exècre. Elle est en transe, elle voit des visages qui rient, qui se délectent de son malheur. Elle pleure davantage, elle panique. Elle se griffe, sans même s’en rendre compte. Elle ne sait plus où elle est. Elle a peur, elle a froid. Elle est déboussolée. Elle est abandonnée. Personne ne la calmera de ce cauchemar ci. Personne ne la sortira de ce qu’elle croyait être un songe agréable. Elle est seule, face à sa hantise, et elle ne peut la vaincre. Elle hurle silencieusement, intérieurement, elle a la sensation qu’elle se meure. Elle a la nausée, elle entend ces voix qu’elle ne comprend pas, elle perd pied. Elle se noie dans une vague brulante qui la submerge. Mais elle voit, au loin, cette bouée, cette ancre qui pourrait la sauver, et elle sait qu’elle ne peut abandonner. Elle ne peut se renfermer dans cette noirceur qui lui est bien trop familière, et qui est dévastatrice. Elle se lève, elle s’approche, elle force le contact, essaye de le maintenir malgré le fait qu’elle soit faible, si faible.

« Mélusine. C’est moi. Ta sœur, la seule qui a tenu ce rôle auprès de toi. Celle qui a tout découvert à tes côtés, qui t’observait si débordante d’énergie à Séverac, si rayonnante, celle qui s’est toujours languie de toi, depuis le départ de ces lieux si chers. Ne me fuis pas, je t’en supplie. Pas maintenant. Pas alors que je te retrouve. »
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Mélusine de Séverac
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MessageSujet: Re: Il en est comme de ces beaux songes qui ne vous laissent au réveil que le déplaisir de les avoir crus. - Molière [PM Mélusine & Mélisande]   Il en est comme de ces beaux songes qui ne vous laissent au réveil que le déplaisir de les avoir crus. - Molière [PM Mélusine & Mélisande] I_icon_minitimeJeu 8 Aoû - 15:11

Did you see them
Going off to fight?
L'ai-je vu, se précipiter vers la combat, ses pas l'emportant vers le fracas des épées, vers le tumulte de la bataille qui se jouait dans la cour du palais ? L'ai-je vu, mon frère, ce guerrier et ce soldat, non pas du Roi mais de notre héritage, champion portant haut la bannière de Séverac pour venger l'affront porté à notre nom ? L'ai-je vu, Melsant, l'arme au clair et la fureur au fond des yeux, s'envoler retrouver Mélisande dans la pénombre des geôles ?

Children of the barricade
Who didn't last the night?
Une soirée, une nuit, pour abattre Arven et maculer de sang les marches du trône, dans cette rébellion sauvage et tumultueuse qui a renversé dans son sillage les grandes lignées de huit royaumes, noyant dans un ruisseau écarlate les enfants de la capitale tandis que la citadelle de la magie s'effondrait sur eux, tel un oiseau pris de folie aux ailes brisées qui serait tombé du ciel comme privé de ses ailes ? Etait-il vraiment là, Melbren notre frère, lui si jeune et si plein de promesses, dans cette nuit funeste qui a tranché le fil de ses jours en même temps que les nôtres ?

Did you see them
Lying where they died?
Imaginer leurs corps brisés sous les décombres, meurtris par les débris, déchiquetés et démembrés, saccagés et défigurés, alors qu'ils sont dans mon souvenir si jeunes et vivants, si beaux et aimants ? Les voir déchus de leur vitalité, étendus dans la mort alors qu'ils étaient trépidants de vie, ne plus jamais entendre les vociférations bravaches de Melsant à quatorze ans, le rire espiègle de Melbren dans les jardins alors qu'il y court avec Castiel, encore enfants, ni même la voix caressante de Mélisande dans la lueur complice des bougies éclairant les hautes voûtes de nos chambres ? Plus rien, juste un écho vain et désabusé de ce qui fut jadis et dont les vestiges sont balayés au vent, fauchés comme la flamme d'une bougie emportée par la brise ?

Someone used to cradle them
And kiss them when they cried.
Ô joyeux temps de l'enfance, ô douces années d'errance entre Sinsarelle, Chamaar et Séverac, ô regrettés mois loin de la souffrance – que reste-il maintenant de ma famille décimée ? Un père attendant le retour de son héritage dérobé, une mère espérant revoir au bercail les enfants qu'elle a portés ? Oh, comment leur expliquer la poussière seule à franchir le seuil, le vide des sièges autour de la table, le silence dans les vergers et les jardins ? Comment ?

Did you see them
Lying side by side?
Oui, voyez-vous, dans la brume des domaines de l'esprit, Mélusine enlacer Mélisande, de fantôme à fantôme ? Je sais bien que je suis endormie, que mes pensées sommeillent et que mon âme vagabonde au gré de mes tourments, mais savourer le contact de ce souvenir qui s'est immiscé dans mes rêves m'apaise, aussi est-ce mal de trouver le réconfort dans ce cauchemar ?

« Mélisande, ma douce, est-ce que cela fait mal de mourir ? »
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MessageSujet: Re: Il en est comme de ces beaux songes qui ne vous laissent au réveil que le déplaisir de les avoir crus. - Molière [PM Mélusine & Mélisande]   Il en est comme de ces beaux songes qui ne vous laissent au réveil que le déplaisir de les avoir crus. - Molière [PM Mélusine & Mélisande] I_icon_minitimeMar 13 Aoû - 15:07

Le vent fait virevolter vos cheveux, comme une douce brise, la lune brille haut dans le ciel, donnant à ces retrouvailles incompréhensibles un goût délectable. Mélisande appréciait la caresse de l’air chaud sur son corps, de voir ce vent Erebien qui les entourait, Mélusine et elle. La surprise la prit, alors même que cette pensée de souffle Erebien se formait dans son esprit. Pourquoi, et comment, pouvait-elle envisager se trouver en Erebor, avec sa jumelle, le complément de son âme, celle qui la connaissait mieux que quiconque en ce monde ?

Mélusine devait avoir raison. Elles devaient être décédées, devaient se trouver dans des limbes nébuleux, dont les puissances en charge étaient désireuses de les tromper, de leur faire croire qu’elles étaient ensemble, et heureuses. Comment aurait-il pu en être autrement ? Ce qu’elle avait pris pour un rêve était nettement plus funeste ; sinistre, même. Définitif, aussi. Mais était-ce si mal ? Comment une telle opportunité, la chance d’être auprès de sa sœur, pouvait-elle être nuisible ?

Un instant, une idée folle la prit. Et si… Et si elle pouvait rester pour toujours ici, en compagnie de sa jumelle, à profiter de ce climat aride qui convenait bien mieux à Mélusine depuis toujours, mais qu’elle regardait avec envie, depuis qu’elle avait pris conscience qu’elle n’était plus, ne pouvait plus être une enfant de Séverac. Peut-être était-ce le mieux, afin de mettre ce passé sans fin derrière elle, que de renouer avec une partie de ses racines, longuement oubliées, longuement écartées par elle, alors que Mélusine les avait toujours embrassées ?

Oh oui, si la mort était si douce et offrait tant de réconfort, il était probablement inutile de chercher plus loin. Elle s’était toujours satisfaite des menus plaisirs que la vie lui offrait, jusqu’au jour fatidique où Waldemar leur avait été dérobé, il était temps de recommencer. Temps d’apprécier ce qui était en sa possession, sans ne plus laisser l’ombre envahir son bel univers. Elle méritait de ne pas s’enliser dans le désespoir et la tristesse.

Un pincement au cœur l’habitait, toutefois. Elle aurait tellement voulu que sa jumelle vive. Elle le méritait, et ses parents ne devraient pas à avoir à vivre la mort de leurs filles. Nul parent ne devrait subir cela, mais les leurs les attendaient depuis si longtemps… Elle ne pouvait toutefois rien y faire, seulement vivre au jour le jour cette opportunité, cette chance.

« Si cela équivaut à passer de délicieux moments en ta compagnie, alors c’est une mort des plus douces que nous vivons… »
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Et ta mémoire vagabonde, sautant de ci, de là, d'un souvenir à l'autre, égrenant le fil de ta vie au rythme de ta respiration. Tu n'as pas vu grand-chose du monde avant de quitter Séverac, c'est vrai – ton enfance est emplie des jardins délicats emplis de fragrance délicates et d'effluves raffinés. Tu as grandi cielsombroise, dans l'inconstance de ce qui était encore ton duché à l'époque, dans une famille aimante. Ta sœur et toi aviez toujours été particulièrement aimées de votre père, si différentes l'une de l'autre et pourtant si terriblement identiques à chaque instant. Tu étais sa petite fée solaire, son feu follet, une étincelle d'énergie vive lancée à toute allure dans les couloirs du château familial... Avec l'adolescence, et la transmission des domaines de votre mère au douaire de ses filles, tu as découvert la poésie sauvage d'Erebor, et ton cœur a changé d'allégeance dans le secret de ton âme, tant le charme du désert parlait aux racines profondes de ton être. Certes, tu aimais toujours autant Castiel, ton petit duc orphelin abandonné aux aléas d'une enfance entre deux parents absents et indifférents, mais les sables d'or t'appelaient intensément à travers le sang de ta mère, dans le galop effréné de tes veines.

Tu n'avais quand même pas vu grand-chose de la vie.

Et Mélisande, ta sœur, ton amie, l'autre moitié de ton être... L'avoir perdue, c'était être morte déjà, coquille vide sans essence, sans le frisson, la vibration symphonique de vos âmes jumelles. Comme,t comment dire ça à vos parents ? Que là où deux existaient, une seule désormais se tiendra ? Impossible. Personne ne peut séparer les deux moitiés d'un même être, les deux faces d'une même pièce, la terre et l'air, l'eau et la flamme, l'ombre et la lumière. Personne ne peut séparer Mélusine de Mélisande, car là où l'une est seule l'autre ne peut exister. Et voilà que soudain la révolte en toi rugit, voilà que l'orage se lève, voilà que l'ouragan gronde. Quoi donc, on voudrait vous tenir loin de l'autre, l'une abattue et l'autre invaincue ? L'une enterrée et l'autre éplorée ? Impensable, inconcevable, inacceptable.

« Je veux rester avec toi. Seule, c'est trop dur, Méli – Méli, tu me manques. J'ai besoin de ta présence. »

Tu sens l'appel du jour frémir, aux limites de ta conscience. Le sommeil menace de lever son voile, mais tu ne veux pas te réveiller – tu ne veux jamais plus te réveiller, tu ne veux pas quitter ta sœur, pas maintenant que tu l'as enfin retrouvée. Le monde peut bien sombrer, l'univers s'embraser et tout s'abattre sur vous dans un fracas d'apocalypse, tu ne veux plus t'en soucier, tu t'en es déjà bien assez préoccupée. Ce qui compte, tout ce qui doit compter, ce sont les bras de ta sœur qui t'enserrent, ta tête sur son épaule, dans le creux de son cou où tu déposes un baiser. N'as-tu pas déjà trop donné à cette vie qui ne t'a rien apporté, et qui a tout détruit sans aucune contrepartie ? N'as-tu pas déjà trop sacrifié ?

Et si... tu ne te réveillais jamais ?
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