C'est en l'an 772 que Raphaël vit le jour à Lune d'Hiver, dans une famille de pirate. Famille qui ne pouvait se détourner de cette vocation, étant de la famille des Ralj, la royauté pirate, il semblait difficile de se débarrasser de ce qu'il avait dans son sang. Son père était capitaine de l'Adoracion, tandis que son frère, son aîné de quinze ans était déjà engagé en tant que « chevalier des mers ». Les Jedidiah avaient cependant une particularité dans leur lignée, ils n'étaient pas de simples pirates, pas de simples gens du peuple non … Leur sang était noble, royal même. Ils étaient en effet les descendants des rois d'Ansemer. Lignée interrompue par les pirates afin de mettre un des leurs sur le trône. Alors, en plus de pirate, son éducation fut aussi tournée vers ce que la noblesse se devait de savoir. Philippe ne s'y était jamais intéressé, bien trop amoureux de la mer, du vent et de cette liberté. S'asseoir sur un trône ? Il n'aurait pas tenu longtemps avant de reprendre la mer.

 On lui apprit le maniement du sabre, la navigation, lire, à écrire, à diriger des hommes, les stratégies militaires, sur terre comme sur mer. Il excellait d'ailleurs dans cette dernière discipline, l'enfant était semblait-il des plus intelligent et des plus malins. Son éducation lui fut octroyée de part son sang commun avec le roi pirate, de grands maîtres établis sur l'archipel leur enseignèrent ce qu'ils savaient. Certains prenaient grand plaisir à tester ses capacités grâce à des jeux, semblant simuler des batailles. Bien que dans les débuts, ceux-ci se retenaient, ils furent très vite obligés de donner le meilleur d'eux-même pour ne pas perdre, avant de ne plus rien pouvoir faire. Oui, son sens tactique, et son instinct étaient des plus affûtés, et, cela, on le remarqua très tôt.

 A ses 12 ans, il monta sur l'Audacia, le bateau de son frère. Sa première bataille, sa première grande frayeur, mais aussi sa première victoire. Bien que tétanisé dans les premiers instants, quelque chose en lui finit par le pousser vers l'avant, ce petit côté bestial que chaque être humain possède en lui, ce côté sombre qui se plaît à faire du mal, cette partie de soi que l'on essaie de cacher au monde, ce petit quelque chose qui nous permet de prendre la vie d'un homme en en ayant conscience. Certains pourraient appeler ça l'âme du guerrier, dans tout les cas, en ce jour, si le jeune rouquin n'avait pas éveillé cette chose, il serait sans doutes mort. Pauvre homme qui pensait trouver en ce garçon chétif et apeuré une cible facile, s'avançant tout souriant, un air malsain sur le visage, avant que ce visage ne se teinte à la fois de surprise et de douleur, quand une lame vint s'enfoncer dans sa chair, juste au dessus de la taille. Le sang dégoulinait le long de sa lame, avant d'atteindre sa main puis son bras. Raphaël resta ainsi figé quelques instants, comprenant ce qu'il avait fait. Ce n'était pas de la peur qu'il ressentait à ce moment, ni de la peine, ni encore une quelconque forme de compassion, c'est en ce jour qu'il comprit ce qu'était réellement ce monde, ce qu'était la vie de marin. La vie de pirate. La loi de la jungle régnait, le fort mange le faible, et, il n'y a nulle place pour un faible. Son immobilité faillit lui coûter la vie, mais, fort heureusement, son grand frère veillait sur lui, parant un coup qui s'apprêtait à lui ouvrir la crâne, avant de contre-attaquer, et occire à nouveau un ennemi. Bousculant son jeune frère pour le rappeler à la raison, avant de s'enquérir de son état. L'apprenti pirate revenant à lui, sourit avant d’agripper son sabre à deux mains, cherchant une nouvelle victime potentielle. Il n'était pas fou, il n'était pas héroïque, il n'était pas un grand guerrier, il n'était … Qu'un pirate. Frapper le dos d'un adversaire afin de le mettre hors d'état de nuire ne lui posait pas plus de problèmes que ça, même si … Lorsqu'il s'imaginait livrant bataille sur le pont, le jeune homme se voyait tel un chevalier blanc, empli de noblesse et de bons sentiments, n'affrontant ses adversaires qu'en duel des plus respectables, défaisant ses ennemis avec habilité et intelligence. La réalité était bien loin de cette utopie, tuer quelqu'un, même dans le dos l'empêchait d'avoir l'un des siens, voire même sa propre vie. Même si, avec une certaine fourberie le garçon réussit à vaincre deux autres hommes, il n'oublia pas sa première victime. Il ne l'oublia jamais, ni même la peur qu'il ressentit en se retrouvant face à quelqu'un qui voulait lui ôter sa vie.

 Alors, à peine fut il rentré qu'il s'abandonna dans le maniement de son sabre, il ne voulait plus ressentir pareille frayeur, il ne voulait plus être un poids que l'on devait surveiller et protéger, il ne voulait plus être inutile lors d'un assaut, et surtout, il ne voulait plus que son frère risque sa vie en le protégeant. Oui, son frère était son héros, depuis tout jeune, il l'admirait, un grand homme, un pirate vaillant et reconnu, avant de devenir capitaine, et montrer aux autres qu'il était encore meilleur qu'on ne le pensait. Il lui servit aussi de père de substitution, ne faisant que les rapprocher. Tout ce à quoi aspirait Raphaël était de monter à bord de son bateau, faire partie intégrante de son équipage et lui venir en aide du mieux qu'il pouvait. Être un fardeau lui était tout simplement impossible. Malgré tout, plus il grandissait, plus il se rendait compte que son point fort n'était pas dans ses bras, dans son sabre ou dans ses jambes, mais bel et bien dans sa tête. Des maîtres le qualifiaient de brillant, certaines compères pirates utilisaient de temps à autres l'appellation de génie. En effet, en  grandissant, lorsqu'il était sur « un champs de bataille » il lui arrivait d'avoir des idées soudaines, des stratégies qui semblaient insensées, et très peu académiques, mais qui pourtant, semblaient marcher la plupart du temps. Dans les débuts, personne ne l'écoutait, un petit jeune semblant envoyer des idées en l'air, semblant être étreint par la peur et le désespoir, qui aurait pu l'écouter ? Le premier à le faire fut son frère, alors que son navire était dans une situation des plus difficiles, Raphaël eut une idée qu'il lui soumis. Après s'être assuré de la certitude de son plan, le capitaine s'exécuta et la situation fut renversée. Ce n'est que suite à cela que, lorsqu'il passait d'un équipage à un autre, les capitaines commencèrent à l'écouter, bien que sceptique sur certains points. Pas un seul ne fut déçu une seule fois.

 Les années passèrent, Raphaël devint une figure emblématique de la nation pirate, tout comme son grand-frère qui était devenu un grand ami de leur roi, Allister Ralj. Philippe finit par se marier à Freyja de Brunante, une femme à peine plus âgée que le plus jeune de la fratrie, mais qui veilla sur lui, telle une mère, ou une grande sœur aimante. Le couple eut trois enfants, Lou-Ann, Lena et Lucy, avec qui le rouquin aimait passer du temps, s'amuser avec et veiller sur elles, prenant toute trois une part importante de sa vie. Bien que sa préférence aille à Lena -mais, ne le répétez à personne- son amour pour chacune est grande, et surtout … Attention à quiconque osera s'approcher d'elles, personne ne touche à un Jedidiah …

 Mais, les beaux jours finirent par s'estomper. L'empire a éclaté, Dragonvale est tombé, et les dragons sont revenus. Il était temps pour que le sang royal, coulant dans les veines de cette famille,
réclame ses droits. Allister déclama qu'il était temps de reprendre Ansemer, le roi en place n'en était plus digne, le trône devait revenir aux descendants des rois de ce pays. Philippe abandonna à son jeune frère  le trône, bien trop amoureux de la mer pour s'enfermer, et sûr que lui, ferait un bien meilleur roi que lui. L'arrivée des dragons menaçaient l'Archipel et, Ansemer était nécessaire à leur protection. Fait étrange, une aide inattendue vint frapper à leur porte. Des alliés de l'humanité, un clan de dragons, les Sage, désireux d'établir la souveraineté humaine. Ils firent de Raphaël une sérénité, la dragonne avec qui il devait partager son corps et son esprit se nommait Sagace. Un esprit des plus agréables, peu contraignant, mais qui adorait parler, blablater sur tout et rien, commentant la plupart des choses qu'elle voyait. Chose qui amusait beaucoup le pirate, certain qu'avec un tel allié, rien ne lui échapperait, deux esprits des plus sages dans un même corps, toute les possibilités seraient envisagées et les meilleures stratégies appliquées. Il était temps pour lui de reprendre ce qui lui appartenait, aidé du seul membre de son clan non dérangé par le fait de montrer sur un bateau … Une grande bataille s'annonçait, avec, comme plus grande alliée, sa belle-sœur.